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Israël-Palestine : les mots face à la guerre

CONTRIBUTION / OPINION. La guerre ne fait pas que des pertes humaines. Elle abîme aussi les mots, victimes silencieuses de la barbarie.

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Depuis le 7 octobre, les mots s’abîment, précipités dans un « no mans land » inédit, dans lequel le bruit et la rumeur cassent leur sens, sans espoir de raison. Mais les mots sont têtus, ils giclent et pétaradent, explosent à la figure, dégringolent dans les enfers, gravissent à nouveau les trous noirs, agrippés au rebord et même si on marche sur leurs doigts meurtris, ils recommencent.

Les mots du monde frappent à notre porte. Ils blessent. Même si nous les désavouons, ils laissent leur trace. Il y a les mots qu’on ne veut pas prononcer, et cette absence est comblée par une violence sourde. Car les mots que l’on ne dit pas sont recouverts par d’autres qui révèlent un autre discours.

Depuis le 7 octobre, le silence n’existe plus. Le 16, même ses pauvres minutes imposées sont scarifiées par les mots. Des mots jetés, des mots transis de haine. En face, il y avait un homme qui les aimait, les mots. Mais les mots des hommes qui aiment les mots ne font pas de bruit. Ils se murmurent, ils ont peur de déranger, ils marchent sur la pointe des pieds, ils veulent donner des noms au temps qui passe, au malheur des hommes, à l’amour. C’est la douceur qu’on assassine.

Depuis le 7 octobre, on joue avec les mots. Comme si leur tonitruant désordre ne suffisait pas, on les ramasse au petit bonheur la chance, on les détourne, on les retourne au beau milieu d’un champ lexical sans boutons d’or, un champ de pensées ruiné, et on les assemble, de gré ou de force pour qu’ils aillent hurler aux oreilles des stupéfaits.

Il y a les pancartes, les drapeaux, les graffiti, les mots qui entrent dans les murs, qui s’agitent avec le vent, qui prennent place, qui s’installent. Il y a...

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