Les cimetières familiaux : un patrimoine et une histoire à faire vivre
CONTRIBUTION/OPINION. Lieux de mémoire, de méditation et d’enracinement, les cimetières familiaux sont aussi le fruit du rapport historique de l’État avec les religions.
Mes grands-parents maternels étaient du Poitou, dans la région de Niort, où il existe de nombreux cimetières familiaux. Les protestants étaient sommés d’aller enterrer leurs morts en dehors des cimetières catholiques, plus tard communaux, bien souvent adossées à l’église, et de nombreuses familles n’avaient d’autres possibilités que de réserver un espace à cet effet au fond de leur jardin, voire au bout d’un champ. Beaucoup de cimetières familiaux sont donc nés de la réforme de l’Église et de ce refus de partager les cimetières jusqu’au décret de 1804 (espaces réservés à chaque religion).
Malgré l’évolution des textes et le développement des cimetières communaux, de nombreux petits cimetières familiaux continuent d’être en usage au XIXe siècle et encore un peu au XXe siècle. La religion ne joue plus nécessairement dans le choix d’y être enterré, mon grand-père n’était plus protestant depuis longtemps, mais la tradition, l’histoire, les émotions décident bien souvent de séjourner aux côtés de ses aïeux. Une fois totalement occupé, plus personne ne peut prétendre y être enterré, ce qui inévitablement condamne leur existence sur le long terme. Ces lieux de dernières demeures abritent aussi toute une vie animale et végétale qui profite de la sérénité : les oiseaux, les hérissons, les écureuils, les lézards, les papillons et les abeilles qui viennent butiner les fleurs ; tout ce petit monde embellit l’endroit et rappelle que nous ne sommes qu’un maillon de la diversité du vivant.
Mon grand-père a entretenu celui au fond du jardin de la maison familiale qu’il a aménagée et agrandie toute sa vie durant. C’est là, bien sûr, qu’il repose depuis son décès en 2007. Ma grand-mère vient de le rejoindre à plus de 101 ans. J’ai écrit les quelques lignes suivantes au sujet de ce cimetière où j’aimais tant me ressourcer et questionner le sens de...