Michel Houellebecq, un tragique moderne
OPINION. Après l’avoir encensé pendant des années, la bien-pensance se met à vouer Michel Houellebecq aux gémonies, incapable de percevoir dans son œuvre le reflet de sa décrépitude post-moderne.
J’ai découvert, il y a une vingtaine d'années, l'écrivain Michel Houellebecq avec son roman Les particules élémentaires, publié en 1998. Un ami avant moi avait lu le roman Extension du domaine de la lutte, et comme il avait vu le film avec Philippe Harel, il me comparait au personnage de Michel : même désenchantement, même vision tragique du monde, surtout après mon tour du monde comme marin militaire dix ans auparavant qui ne faisait que confirmer la vision des grands écrivains et la mienne. J’écrivais beaucoup (et toujours) sans espoir d’édition après quelques refus, résigné — Paris est pour moi une planète inhumaine — et donc des publications frustrantes à compte d’auteur. C’est à cette occasion que j’avais envoyé un message à Michel Onfray qui avait donné son adresse mail lors d’une interview à France Inter, je crois, et m’avait renvoyé un message immédiatement : « Résistez, continuez, amitiés. »
Houellebecq a connu l’hôpital psychiatrique, n’arrivant pas à se faire publier, tombant dans une dépression profonde. Et puis la célébrité arriva d’un coup ! Mais il était à Paris. Il tomba sur un petit éditeur, Maurice Nadeau, un coup de chance, vital.
L’écriture de Houellebecq possède cette évidence de la puissance tragique qui révèle comme Balzac, un réalisme cru, sans détour sur les agissements et espoirs des humains, courant après les désirs inassouvis, les trahisons, les petits calculs, les médiocres échecs, existences d’errance.
Mon ami, musicien, m’invita à voir Houellebecq en concert à Lyon en 2000, car il était poète aussi et avait mis ses poèmes en chanson. Je le voyais et l’entendais comme je l’imaginais, avec cette présence implacable d’humain pétri de rêves et de poésie : comme tout le monde, quelconque et unique à la fois. Au bar, après le concert, je l’ai vu fumer et il semblait épuisé. Mon ami et...