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Polysémie de la « démocratie libérale » : une confusion savamment entretenue

CONTRIBUTION / OPINION. La confusion qui entoure la définition des termes « démocratie » et « libéralisme » sert d’assurance vie au système. Car si notre État semble libéral au sens sociétal, il ressemble plus à une démocrature illibérale au sens politique.

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« Au-delà de l’établissement de règles pour la préservation mutuelle, les sociétés libérales ne cherchent à définir aucun objectif pour leurs citoyens ni à promouvoir un mode de vie comme supérieur ou préférable à un autre. Quelle que soit la positivité de son contenu, la vie doit être remplie par l’individu lui-même. Ce contenu positif peut être fort élevé, et fait de service public et de générosité privée ; il peut être tout aussi bien fort bas, et fait de plaisirs égoïstes et de mesquinerie personnelle. L’État en tant que tel y est indifférent. Le gouvernement a en fait la charge de tolérer les différents “styles de vie”, sauf lorsque l’exercice d’un droit empiète sur celui d’un autre. En l’absence d’objectifs positifs “plus élevés”, au cœur du libéralisme selon Locke, ce qui remplit le vide est l’accumulation effrénée de richesse, libérée désormais des contraintes traditionnelles du besoin et de la pénurie. » Ces mots sont du politologue Francis Fukuyama dans son essai La fin de l’histoire et le dernier homme publié en 1992.

L’Occident traverserait, selon lui, un profond malaise démocratique, habité de peuples hantés par les passions tristes de la haine et du ressentiment. Il y aurait quelque chose de pourri dans les démocraties libérales, gangrénées par les miasmes qui s’épandent depuis l’antre fétide des régimes autoritaires. Inspirés par une foi indéfectible dans le progrès, les Saint-Georges du monde libre ont dès lors sanglé leurs destriers, et sonnent la charge contre les dragons de la démocrature illibérale, afin d’ouvrir enfin en grand les portes de la Jérusalem terrestre de l’État libéral, cette prophétie politique qui sera, pour le XXIe siècle, ce que les téléologies socialistes ou fascistes ont été pour le XXe. Cette mise en scène flatteuse et manichéenne se heurte pourtant de plus en plus à la perplexité de peupl...

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