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Dubaï, cité des élus et des damnés du libéralisme

CONTRIBUTION / OPINION. Dubaï, paradis de la modernité heureuse, ou bien reminiscence d'une Antiquité dystopique où les puissants écrasent les faibles ? Les deux, et c'est là le plus inquiétant.

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© CELINE CHOEL


Dubaï, la ville du futur : ses architectures innovantes et rutilantes, ses chantiers pharaoniques, son dynamisme économique, ses nombreux services. Les touristes viennent y rechercher luxe, plaisirs et dopamine. Les postulants au précieux sésame d’une carte de travail viennent y chercher quant à eux de quoi subsister. Car derrière ce mirage tout droit émergé du sable, 85 % de travailleurs y triment, y peinent, s’y déshumanisent. La main d’œuvre, c’est ce qu’il y a encore de moins cher à Dubaï : la richesse créée par la misère.

Résurgences de Babel, dont le ciel est définitivement privé d’étoiles. Ici plus qu’ailleurs il faut se rendre à l’évidence que les écarts y sont criards, abyssaux. Comme aux temps immémoriaux des pharaons. Ecarts insolents. Dérangeants. Écœurants. Terrifiants. Amoraux. Abjects. Mais les dieux ont été crées pour éviter que les damnés ne s’en insurgent. Subtile ruse, pensée par les jouisseurs dans le but de s’épargner d’ éprouver une once de culpabilité. Alors prions. Du moins laissons prier les damnés, parce que les élus ne se soucient pas d’eux et de leur peu enviable sort. Normal, ils les paient pour leur besogne.

Et ce n’est pas de l’aveuglement, mais bien de l’indifférence pour ceux qui leur demeurent volontairement invisibles. Une armée docile, serviable, interchangeable ; flot perpétuel de travailleurs qui se pressent souriants de survivre grâce à l’heureux sésame qui contentera à peine leur estomac bruyant. L’humanité des oubliés dont le ventre crie famine se presse aux portes de la cité rutilante avec la promesse d’un avenir meilleur.

Juste à côté d’eux, les jouisseurs. Fiers et méprisants. Ceux qui trouvent la chose logique, ou qui n’en ont même pas conscience dans le meilleur des cas. Question d’offre et de demande somme toute. Car personne ne semble voir ces indigents. Ou plutôt, personne ne veut les remarquer. Pas le temps...

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