Un prof en grève
OPINION. L’enfer des protocoles sanitaires a poussé une grande partie des enseignants à faire grève ce jeudi. Pour notre lecteur, cette situation n’est que la goutte d’eau qui a fait déborder un vase déjà bien rempli.
J’ai décidé de faire grève ce jeudi 13 janvier en raison d’une lassitude et d’un épuisement trop lourds à supporter. Ces deux années de Covid ont mis comme d’habitude les enseignants face à leurs responsabilités dans une solitude totale. Distanciel, présentiel puis distanciel puis une pratique démentielle des tests qui a vidé les classes et entretenu l’affolement général devant des discours politique, scientifique et journalistique complètement inaudibles ! Tous ces bavards irresponsables parlent à longueur de journée, mais les premiers de corvée sont toujours envoyés en première ligne, pour faire parfois juste de la garderie pendant que les parents travaillent et font marcher l’économie française.
C’est surtout le mépris face à ces hussards de la République, forces vives de tout établissement scolaire français qui est difficile à accepter ! Depuis une trentaine d’années que j’enseigne, les discours médiatiques n’ont jamais révélé les difficultés du métier, mais sous-entendu toujours l’irresponsabilité ou le privilège des profs, alors que nous travaillons après des années d’études supérieures et un concours avec un salaire médiocre. De plus, j’ai rapidement découvert, dans ce système collectif de l’Éducation nationale, que le prof était seul, face aux élèves, aux parents, à la hiérarchie. On vous surveille, vous culpabilise, vous infantilise : pas de vague, encaisser et encaisser encore. « Un fonctionnaire, ça fonctionne » m’a répondu un jour un directeur. Et « chacun ses problèmes », monde kafkaïen ! Un prof est bien un être seul qui vit l’injustice en permanence et subit en attendant… Godot…
Et c’est pourquoi les concours de profs sont désertés, car pour avaler des couleuvres, il faut y être préparé ! On se demande où est la mission du pédagogue qui doit transmettre un savoir rare et de qualité pour former les citoyens de demain quand l’école est devenue une auberge espagnole où parents, politiciens, administratifs, bureaucrates ignorent tout de l’investissement humain...