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Un souverainiste peut-il se dire libéral ?

CONTRIBUTION / OPINION. En s’enfonçant chaque jour un peu plus dans la crise politique, géopolitique et économique, l’Union européenne a, malgré elle, réhabilité la nation. Les souverainistes doivent-ils pour autant rejeter le libéralisme qui fut l’idéologie de la construction européenne ?

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Une des erreurs à ne pas commettre est de confondre économie libérale et société libérale. Combien de fois n’a-t-on pas entendu des personnes affirmer que le montant des dépenses publiques et le niveau des prélèvements obligatoires rendaient de facto notre pays socialiste ou illibéral ? Tout cela n’est pas si simple, et il faut plutôt envisager le libéralisme comme un fait social total. L’anthropologue Marcel Mauss définissait le fait social comme toute manière de faire, fixée ou non, qui exerce sur l’individu une contrainte extérieure. Au-delà d’une simple accumulation arbitraire de détails, le fait social est défini dans le temps, dans l’espace et dans une certaine société. Concernant la société libérale, Alain de Benoist la qualifie de société « où dominent la primauté de l’individu, l’idéologie du progrès, l’idéologie des droits de l’homme, l’obsession de la croissance, la place disproportionnée de la valeur marchande, l’assujettissement de l’imaginaire symbolique à l’axiomatique de l’intérêt, etc. »

Le libéralisme est une négation du souverainisme


Pour Friedrich Hayek, qui fut l’un des grands penseurs libéraux modernes, l’humanité a adopté au cours de son histoire deux systèmes moraux et sociaux opposés : l’ordre tribal et l’ordre étendu. Caractérisé par des comportements « instinctifs » comme la solidarité et l’altruisme, l’ordre tribal s’est peu à peu défait — notamment à cause des structures sociales plus impersonnelles — pour laisser place à une société où les comportements deviennent contractuels, abstraits. L’autre marqueur de la « société ouverte » (Karl Popper) est la disparition de tout projet politique associant la collectivité à un but commun, et c’est pour cela qu’Hayek rejette toute forme de planification, d’interventionnisme étatique ou d’économie administrée. Dans les sociétés modernes et atomisées, seul le marché devient la clé de voûte qui soutient le système.

Le libéralisme, par ses fondements, consomme la rupture avec le principe holiste. C’est-à-dire qu’il nie la notion d’intérêt...

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