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Yoram Hazony : Le nationalisme, un patriotisme au-delà des clivages ?

ENTRETIEN. Si le patriotisme bénéficie régulièrement (et de plus en plus) d'une image positive dans l'inconscient collectif, le nationalisme reste quant à lui voué aux gémonies de l'Histoire. Le philosophe conservateur israélien Yoram Hazony, auteur du remarqué Les vertus du nationalisme (éditions Jean-Cyrille Godefroy, 2020) défend quant à lui un autre traitement du concept. Des propos recueillis par Pierre-Yves Rougeyron.

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Pierre-Yves Rougeyron : Vous semblez définir le nationalisme de façon minimale comme la volonté de promouvoir un ordre politique fondé sur des nations indépendantes et libres. Cette définition a l’avantage d’être claire, mais n’est-elle pas trop abstraite ?

Yoram Hazony : Au contraire, c’est la fameuse « gouvernance mondiale » qui apparaît abstraite. Les peuples ne se sentiraient pas autant dépossédés sinon. Les nations et le nationalisme sont éminemment concrets comme l’est, dans un ordre anthropologique, le sentiment de piété familiale.  J’ai essayé dans mon ouvrage Les Vertus du Nationalisme de dénoncer tous les faux arguments et les mensonges qu’on a déversé sur le nationalisme et sur les nations pour faire advenir des structures impériales qui ne disent pas leurs noms. Je dénonce par exemple toute une école menée par des gens comme l’historien irlandais Benedict Anderson qui pense que la Nation est n’est pas un fait historique mais une construction abstraite [1]. Au-delà de l’aspect historiquement biaisé de leurs démarches, je crains qu’il ne se rende pas compte qu’en affaiblissant la liberté nationale, ils nient sciemment ou non la liberté humaine et préparent justement les peuples à la servitude.

Pierre-Yves Rougeyron : Pourquoi faites-vous remonter l’esprit du nationalisme à l’histoire biblique juive ?

Yoram Hazony : Je fais une généalogie de l’Etat à travers l’élargissement des sphères de loyauté des individus. Cela me conduit de la famille à l’Etat via les tribus et les clans. Ce faisant, l’unification des tribus d’Israël devient un archétype de la naissance de l’Etat national. Mais attention, ne nous méprenons pas. Cette naissance qui est détaillée dans la Bible est l’alternative à l’échec du projet divin. En effet, l’histoire biblique ne décrit pas l’Etat national comme idéal. La préférence initiale du divin aurait été que les israéliens arrivassent à forger l’unité nationale sous l’égide des tribus et des clans sans...

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