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David Cayla : « Contrôler les prix de l'agriculture est une mesure d’intérêt général »

ENTRETIEN. Économiste hétérodoxe et membre du collectif des Économistes atterrés, David Cayla a publié récemment un article intéressant sur Le Temps des ruptures consacré au modèle agricole français et à la souveraineté alimentaire. Nous l’avons interrogé à ce sujet.

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Front Populaire : Nous invitons nos lecteurs à se reporter à votre texte dans sa globalité, mais pouvez-vous nous décrire en quelques lignes l’état de notre modèle agricole ?

David Cayla : Il ne va pas bien. C’est un modèle qui vise à accomplir simultanément plusieurs objectifs contradictoires. En premier lieu, la compétitivité. L’agriculture française est en effet en concurrence directe avec d’autres modèles agricoles tant dans l’Union européenne (Espagne, Allemagne, Pologne…) que vis-à-vis d’autres régions du monde (Amérique du Sud, Canada, Nouvelle Zélande…).

Cette concurrence tend à entraîner une spécialisation des agriculteurs dans des productions qui sont soit fortement mécanisées, comme le blé et les céréales, soit peu transportables, comme le maraichage, soit à forte valeur ajoutée, comme le vin. Mais cette spécialisation a un revers : elle implique une forte dépendance aux intrants importés, notamment aux protéines végétales, telles le soja brésilien, nécessaire pour nourrir le bétail. De ce fait, elle ne peut accomplir un deuxième objectif, celui de la souveraineté alimentaire, car ce type de spécialisation sur des créneaux précis des filières agricoles ne peut tenir toute la chaîne.

Enfin, le troisième objectif, celui de la protection de l’environnement, est aussi en contradiction avec la compétitivité. On l’a mesuré lorsque le gouvernement a voulu interdire l’usage du glyphosate. Une telle mesure, parfaitement possible techniquement, aurait nécessité de recourir davantage au désherbage mécanique, qui est bien plus coûteux et qui aurait réduit de manière irrémédiable la compétitivité agricole.

De manière générale, on constate un recul des surfaces cultivées en France depuis les années 1960 et une stagnation des rendements à l’hectare depuis le milieu des années 1990. Ces deux effets entrainent une baisse globale de la production agricole, alors que dans d’autres pays, comme aux États-Unis, les rendements continuent d’augmenter et sont parfois supérieurs aux rendements français.


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