Nul ne l’ignore, du moins j’ai la faiblesse de le penser, que notre civilisation judéo-chrétienne repose sur le péché originel. Je n’entre pas ici dans le détail allégorique – le jardin d’Eden, le serpent qui parle, le choix de goûter du fruit de l’arbre de la connaissance, le péché originel, la malédiction induite, etc.

Je conserve juste l’anthropologie qui s’ensuit comme une leçon philosophique : l’homme n’est pas naturellement bon. Précisons : l’homme est même naturellement mauvais, c’est culturellement qu’on peut le sauver par une vie chrétienne faite de foi dans le message d’un Christ ressuscité et de résipiscence, de repentance, de pénitence.

Le texte de la Genèse, qui ouvre la Torah des Juifs et le Pentateuque des chrétiens, a plus de deux mille ans. L’occident y prend sa source. Qu’on le veuille ou non, y compris chez les athées les plus radicaux, notamment chez les militants décolonialistes, ce schéma reste dominant et structure leur catéchisme : la faute (colonialiste), la contrition (des Blancs), la punition (des Occidentaux), le châtiment (des leucodermes), la damnation (des judéo-chrétiens). Parodions Chesterton : le wokisme est un christianisme devenu fou.

Sortons la question du péché originel du schéma chrétien. L’homme est-il, oui ou non, naturellement bon ? Un homme a dynamité les fondements de la religion chrétienne en affirmant l’inexistence du péché originel : Rousseau. Dans son Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes (1755), il écrit : « Posons comme maxime incontestable que les mouvements de la nature sont toujours droits : il n’y a point de perversité originelle dans le cœur humain ; il ne s’y trouve pas un seul vice dont on ne puisse dire comment et par où il est entré. L’homme est naturellement bon… (c’est la société) qui déprave et pervertit les hommes. »

Fidèle à sa méthode, Rousseau pose une maxime incontestable : or, poser, c’est imposer, c’est postuler, ce qui...