Berlin 1936, Moscou 1980, Paris 2024… Quarante-quatre ans, dix olympiades, séparent des éditions des Jeux olympiques qui au-delà de l’ode au sport, ou de la promotion du pays hôte, ont servi de porte-voix à une idéologie. Après le fascisme, puis le communisme, c’est donc le libéralisme qui a profité de l'événement planétaire pour se poser en majesté, et faire démonstration de sa force, avec une France qui se sera positionnée comme l’avant-garde du libéralisme anglo-saxon.

Le libéralisme économique, néolibéral, s’est offert la privatisation de la Cité. De Visa qui s’est approprié l’exclusivité du paiement par carte de crédit, à LVMH qui s’est lui arrogé le chic français, ces jeux olympiques ont été l’illustration du « winner takes all » que porte l’économie globalisée. LVMH, sans lequel le faste de la cérémonie d’ouverture n’aurait été qu’un fantasme, a pu s’offrir le plus grandiose des placements de produits, et incarner, à lui seul, aux yeux du monde, le luxe à la française. Les petits damiers mordorés sont désormais pour la France, ce qu’un certain soda brun et pétillant est aux États-Unis, non plus la réification d’une civilisation, mais un symbole mercantile et mondialisé. Ainsi, comme son porte-parole a pu l’avancer, Vuitton retrouvera probablement Coca-Cola à Los Angeles, puis à Brisbane, Paris n’étant pour LVMH qu’une étape dans la conquête des marchés.

Le libéralisme sociétal, qui a remplacé le socialisme comme moteur du progressisme, a lui affiché sa sainte trinité, équité-diversité-inclusion, dont ces jeux ont été une profession de foi ; des vertus cardinales de notre temps, que les forces capitalistiques affichent avec ostentation, afin de gagner leur ciel, et détourner à leur profit les passions égalitaristes. L’« appropriation culturelle » de la Cène en a été l’acmé, la prise de la Bastille d’un monde illibéral, contre lequel certains penseurs de la cérémonie d’ouverture ont déclaré explicitement...