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Mémoires d’un juge trop indépendant

La Rédaction

07/02/2021

CRITIQUE. Figure emblématique de la lutte anticorruption, le magistrat Renaud Van Ruymbeke a couché ses souvenirs sur papier et fait paraître en ce début d’année : Mémoires d’un juge trop indépendant, chez Tallandier. Un témoignage d’importance qui offre une cavalcade judiciaire dans les allées de la 5ème République.

Mémoires d’un juge trop indépendant

Acteur et témoin d’une époque, Renaud Van Ruymbeke l’est assurément. Il n’est pas exagéré de dire qu’il est devenu au fil du temps le visage de la magistrature et, à tort ou à raison, le modèle du juge d’instruction, notamment dans les grandes affaires politico-financières de ces dernières décennies.

Son récit s’ouvre sur l’énigmatique et rocambolesque « affaire Boulin », à la toute fin des années 1970. Robert Boulin, ministre du Travail du président Giscard d’Estaing, vient d’être retrouvé mort dans un étang la forêt de Rambouillet. Dans ce qui semble être la lettre qu’il a écrit avant de se suicider, il accuse un « juge ambitieux et haineux ». Ce juge n’est autre qu’un juge d’instruction de Caen âgé de 27 ans, en poste depuis deux ans : Renaud Van Ruymbeke. « Je reçois dès le lendemain des menaces anonymes, comme ce billet émanant d’une prétendue association d’anciens résistants proches de Robert Boulin : « On ne t’oubliera pas ! » », raconte Van Ruymbeke. Sacré baptême du feu.

Baptême du feu et naissance d’une vocation, notamment pour prouver à son père qu’il est possible d’être un magistrat intègre et indépendant. M. Van Ruymbeke père, grand commis de l’Etat, avait en effet une bien piètre image de la corporation, faisant observer à son fils : « les magistrats qui ont condamné pendant la guerre les résistants sont les mêmes que ceux qui ont jugé les collaborateurs à la Libération. Des lâches. » Et Renaud Van Ruymebeke d’ajouter : « Je constaterai, dans les années qui suivent, l’existence de nombreuses obstructions liées à la sensibilité des dossiers qui me seront confiés. Il n’était toutefois pas envisageable d’abandonner sans me renier – et donner raison à mon père. »

En 1991, alors qu’il vient de rejoindre la chambre d’accusation de la...

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