« Deviens ce que tu es » : Injonction de Friedrich Nietzsche qui pourrait être le prolongement du « Connais-toi toi-même » de Socrate. Selon le philosophe prussien, l’homme n’est souvent « qu’un brouillon de lui-même, un inachèvement, une ébauche »… un balbutiement comme dirait Aragon… voire une auto-trahison construite peu à peu pour ne pas déroger aux normes de son temps. Alors, pour se réaliser, l’homme doit se libérer de son double artificiel, mais pour ce faire, a besoin d’un impératif : la volonté de se défaire d’un costume auquel il s’est tant habitué qu’il lui est devenu comme une seconde peau bien chaude et confortable.

Les véritables hommes d’État n’utilisent pas de fards et de phares trompeurs. Quand les enjeux deviennent vitaux, les vertus doivent remplacer les artifices. Comme la graine ne peut révéler son potentiel que dans un environnement favorable, les grands hommes ne peuvent éclore que dans des circonstances exceptionnelles. Qu’auraient été Charles de Gaulle ou Winston Churchill s’ils avaient atteint l’âge de raison à l’orée du troisième millénaire ?

Marine Le Pen est devenue ce qu’elle est. La présence tutélaire de son menhir de père a pesé lourd sur ses épaules enfantines. Ayant choisi de se dédiaboliser puis de se normaliser en renonçant aux provocations inutiles puis en édulcorant ses propos, Marine Le Pen s’en est trouvée apaisée, un brin désabusée, se complaisant dans un doux ronronnement au diapason de celui de ses chats. Elle n’aspire qu’à être enfin aimée. C’est sa véritable nature ; son véritable moteur.

À l’inverse, Éric Zemmour est resté ce qu’il a toujours été : un intellectuel aimant croiser le fer jusqu’à le rendre incandescent, langue de feu versus langue de bois. Nul besoin de devenir un autre quand on est autant à l’aise avec soi-même. Ce qui le fait se mouvoir est le besoin de reconnaissance ;...