« Et l’Homme créa le robot à son image »
CONTRIBUTION / OPINION. Des robots qui passent l’arme à gauche et des humains qui s’en émeuvent… Ou quand l'humanité transmet une part d'elle-même à ses créations.
Fait divers récent : en Corée du Sud, le 20 juin dernier, les habitants de la ville de Gumi sont sous le choc, tombent en larmes ; l’émotion est particulièrement vive dans tout le pays. Un robot fonctionnaire œuvrant à la mairie aurait sauté volontairement du haut de l’escalier, souhaitant en finir avec sa fade existence. Un robot suicidaire ? D’autres cas encore, plus anciens, sont rapportés comme autant de scénarii dignes de romans d’anticipation. Un robot se serait ainsi jeté dans une fontaine sous l’œil médusé des spectateurs dans un centre commercial de Washington en 2017 : suspicion de burn out. Ou encore la troublante anecdote relatée par les organisateurs de l’exposition « Humans Need Not Apply » consacrée à l’Intelligence artificielle, qui s’est tenue entre février et mai 2017 à Dublin : un trio de robots programmés pour imiter les gestes des humains filmés par une caméra aurait volontairement arraché leurs fils à plusieurs reprises. Les organisateurs, spectateurs ébahis, consignent les faits avec sidération d’autant qu’à chaque réparation, les robots réitèrent leur geste désespéré sans l’avoir vu préalablement effectué chez les personnes visitant l’exposition. Les organisateurs jurant bien évidemment ne pas avoir programmé cette réaction d’autodestruction chez leurs androïdes… Au Japon, on utilise même désormais des robots, alter ego crédibles pour récréer un « lien social » avec les hikikomoris reclus dans leur intérieur — quel pied de nez — tout cela sous l’impulsion du très sérieux ministère de la Solitude. Les robots pourraient-ils nous rendre notre humanité en communiquant avec nous, en nous réapprenant à nous comporter comme des hommes, en nous émouvant par leur ersatz d’humanité ? Quelle ironie...
Tous ces faits divers posent surtout le constat qu’à force de vouloir humaniser la machine, on en vient à lui prêter des comportements humains. Hugo, pourtant, nous prévenait déjà en 1856 des risques inhérents à créer...