La terrible erreur de Robert Badinter
CONTRIBUTION / OPINION. Robert Badinter a reçu pléthore d’hommages pour avoir aboli la peine de mort. Mais peu nombreux sont ceux qui se souviennent de son rôle néfaste dans la crise yougoslave, dont nous continuons de payer le prix.
On a largement rendu hommage, à juste titre, à Robert Badinter, et à son action en faveur de l’abolition de la peine de mort. Curieusement, très peu de commentateurs ont évoqué, sinon de façon allusive, l’importance du rôle qu’il a joué dans la crise yougoslave, en tant que président de la « Commission Badinter ». Or, on ne peut que regretter qu’en ce moment tragique dont l’Europe n’a pas fini de subir les conséquences, il n’ait pas su ou voulu faire prévaloir le droit sur la politique, à rebours de ce qui avait été le combat de toute sa vie.
L’une des conséquences de la Première Guerre mondiale a été la dissolution de l’Empire austro-hongrois et la création de l’État des Slovènes, des Croates et des Serbes, à la demande de ces peuples d’origine slaves. Cet État devint le Royaume de Yougoslavie, puis la République fédérale socialiste de Yougoslavie après la Seconde Guerre mondiale, sous la direction du maréchal Tito.
La Slovénie était essentiellement catholique, alors que les orthodoxes et les musulmans se partageaient le reste du pays. Aussi, était-il tentant pour ses dirigeants de mettre à profit, d’une part, la vacance politique succédant à la mort du maréchal Tito en 1980, qui avait été l’unificateur et le garant charismatique de l’unité de la fédération yougoslave, et, d’autre part, l’implosion de l’Union soviétique, très attachée à l’intégrité de la Yougoslavie face aux États-Unis et à l’OTAN. En décembre 1990, ils organisèrent un référendum en vue de l’accession à l’indépendance, qui fut ratifié par plus de 85 % de la population. Compte tenu des hésitations des puissances étrangères à soutenir cette partition, qui allait à l’encontre des principes d’intangibilité des frontières issues de la guerre et créait un dangereux précédent, la Slovénie déclara unilatéralement son indépendance le 25 juin 1991. La Croatie en...