Nation française et nation serbe : celles qui meurent et celles qui résistent
OPINION. La question de la substance des nations nous pousse à réfléchir à la manière dont elles naissent, mais surtout dont elles déclinent. Une interrogation nourrie par les cas français et serbe.
La Nation ne peut être un agrégat d’individus, êtres uniques et singuliers, mais une communauté de personnes, êtres moraux et sociaux. Le repère national, décrié en France comme source majeure des conflits par les héritiers idéologiques mêmes de ceux qui l’avaient biaisé et érigé en mythe fédérateur de puissance — les révolutionnaires de 1789 —, celui du peuple politique souverain assumant son destin, n’est, originellement, que le signe abouti d’une existence de groupe.
Car, si son étymologie l’associe à « naissance », il s’agit bien d’une éclosion, d’une vie, pour durer jusqu’à son terme. À l’époque médiévale, l’idée de nation était comprise comme la représentation d’un groupe humain spécifique ; d’origine commune par destin ; les coutumes, la langue et l’établissement territorial en constituant les identifiants de base. Ne parlait-on pas de nations française, normande, picarde, gasconne, allemande ou polonaise, etc., dans les universités de Paris ou Bologne ? Quid aujourd’hui des « nations » provinciales, dévorées par la « Grande Nation » ; elle-même en décrépitude, dès lors que ses provinces charnelles sont devenues de simples « territoires » sans âme ? Lorsque Paul Valéry nous rappelait que les civilisations sont mortelles, il va de soi qu’il englobait dans le constat la disparition des nations qui en sont porteuses. Encore que le terme du décès soit variable en fonction de la vigueur de la conscience de soi de chaque groupe et de sa volonté de durer nourrit par les valeurs qui le constituent en termes de nation.
« La civilisation judéo-chrétienne européenne se trouve en phase terminale », soutenait Michel Onfray voici quelques années, dans son livre Décadence, assurant avoir constaté ce phénomène « comme un médecin le ferait d’une desquamation ou d’une fracture, d’un infarctus ou d’un cancer ». Décadence, déclin, autres vocables du cancer dont l’effacement de la conscience nationale au profit de l’individuation est la métastase de...