Quand le Rassemblement National tourne le dos au populisme
CONTRIBUTION / OPINION. Le Rassemblement national a-t-il abandonné la stratégie « bloc contre bloc » au profit d'un retour au traditionnel clivage gauche droite, en sacrifiant au passage sa stratégie populiste ? Il en prend en tout cas la voie, d'après notre contributeur.
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« Il faut sauver le soldat Bernard Arnault ». Le 18 février 2025, sur le plateau d'Apolline de Malherbe, Jordan Bardella était un homme en mission. Le président du Rassemblement National assurait avoir entendu "le cri d'alarme" du patron de LVMH, cinquième fortune mondiale, et des entrepreneurs français, paniqués par la précédente annonce du gouvernement de relever les impôts sur les sociétés. L'air grave, manifestement bouleversé par la détresse de nos pauvres milliardaires, il dénonce avec force l'enfer fiscal que serait devenu la France et se porte au secours des grands capitaines d'industries qui, souvent "se lèvent bien plus tôt que leurs salariés". Le patronat démuni appréciera cette salve contre ces fainéants de travailleurs, d'autant que Jordan Bardella, de par sa longue expérience du monde du travail, est assurément le mieux placé pour en parler.
Ce n'est pas la première fois que le jeune patron du parti à la flamme se pose en champion du libéralisme économique. Dans un entretien donné à Valeurs Actuelles le 12 février dernier, Jordan Bardella annonçait sans ambiguïté ses ambitions pour l'élection présidentielle de 2027 : conquérir les électeurs de droite. Assurant partager avec eux "l'essentiel", le président du Rassemblement National en partage assurément la rhétorique : baisse des impôts, réduction de la dépense publique et du nombre de fonctionnaires, dénonciation de la « lutte des classes mortifère » et de « l'idée qu’il faudrait opposer le patronat et le salariat »... Le discours est manifestement celui d'une droite revendiquée, assumée. Décomplexée, comme disait Nicolas Sarkozy. Et justement, Jordan Bardella reprend à son compte l'héritage politique de l'ancien président de la République, et s'il lui reproche des résultats décevants, il le rejoint « sa stratégie qui, en 2007, visait à réconcilier le vote populaire avec l’élite entrepreneuriale et économique ». « Je revendique aujourd’hui cette même ambition », ajoute-t-il, y voyant « une stratégie gagnante pour le Rassemblement...