Socrate meurt encore
OPINION. Les politiques de santé publique face au Covid-19 sont-elles toujours en phase avec l’essence même de la médecine ? Selon notre lecteur, elles s’en sont (en tout cas philosophiquement) éloigné.
Les temps ont changé depuis Socrate et son procès. Mais pas la bêtise ni la bassesse des hommes ! Les sophistes actuels et le martèlement de leurs raisonnements à la cohérence factice invitent à se replonger dans quelques considérations philosophiques socratiques et aristotéliciennes — si tant est, d’ailleurs, qu’il ne s’agisse pas là d’une tautologie. Philosophique, socratique, aristotélicien : trois nuances d’une même réalité, Socrate étant le père de la philosophie occidentale, Aristote le maître du genre humain, d’après Hegel lui-même…
À cet égard, un bref raisonnement de la fin du livre I de l’Éthique à Eudème d’Aristote, glané au hasard d’une lecture, est particulièrement éclairant : « Que la fin (télos) soit cause des choses qui lui sont relatives, c’est évident d’après l’enseignement. En effet, une fois la fin définie, on montre pour le reste que chacune de ces choses est bonne ; car la cause est le “ce en vue de quoi”. Par exemple, si être en santé est ceci, il est nécessaire que ce qui est utile relativement à la santé soit cela. Ce qui est sain cause la santé comme cause motrice, et est alors la cause de son existence, mais non de ce que la santé soit un bien. De plus, personne ne démontre que la santé soit un bien, à moins d’être sophiste et non pas médecin – car ceux-là usent d’arguments étrangers au sujet pour faire leurs sophismes. Comme on ne le fait pas davantage pour aucun autre principe » (op. cit., I, 8, 1218 b 16-24).
Comprenons bien ce qui est en jeu : la santé de tel individu est la fin recherchée par le médecin. La première, l’unique vocation du médecin est de rendre la santé aux personnes malades ; c’est ce que l’on appelle guérir. Cette fin aimée et poursuivie, rendre la santé, le médecin y...