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Vote électronique : désacralisation de la politique

OPINION. Après l’abstention record aux régionales, le vote a distance a ressurgi dans le débat. Loin d’être une solution à la crise démocratique, il symbolise la désacralisation de la chose publique et le délitement de la recherche du bien commun.

/2021/07/VOTE-ELECTRONIQUE-POLITIQUE

Face à l’abstention record aux élections départementales et régionales a (ré)émergé la fausse bonne idée du vote « en ligne ». Cela permettrait d’exercer ce droit civique depuis son canapé, de la même façon que l’on commande un UberEats. Outre les difficultés, voire l’impossibilité, de réaliser un tel fantasme en palliant tous les dysfonctionnements techniques liés à la sécurité, la fiabilité et la liberté du vote, cela nous apparaît comme un symptôme inquiétant de la désacralisation, en son sens le plus délétère, de la chose publique, entendue ici non pas comme la République, mais comme toute démarche politique.

Derrière la volonté, du moins en apparence, de rendre l’espace démocratique plus accessible (bien que nous ne saurions limiter l’espace démocratique aux urnes), c’est la banalisation d’un moment politique se laissant charmer par les sirènes de notre temps. Se déplacer dans un bureau de vote a un caractère intemporel et est d’ailleurs bien plus accessible à la majorité des citoyens qu’un vote en ligne. Cela peut sembler être un détail, mais se déplacer pour aller voter en présentiel est un des derniers vestiges d’un semblant de cérémonial et de sacralisation politique en cette fin de Vème République. Où et quand, aujourd’hui, l’action politique apparaît-elle comme respectablement au-dessus de la mêlée ? Nulle part. Tâchons au moins de conserver l’infime part qu’il nous en reste dans l’effort fait pour aller voter.

Il ne s’agit pas de défendre une mise en scène, une noblesse d’apparat, mais de redonner à la politique son poids. Comment peut-on souhaiter que ce qui organise — et nous donnons tout son sens à ce mot — notre vie en commun se roule dans la boue avec tout ce que nous cédons déjà à la banalité, la fainéantise et la facilité ? Cela s’inscrit dans un contexte plus large de destruction des « grandes finalités »,...

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