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Le démon de Zemmour (3/8)

L’IMPOSSIBLE PRÉSIDENCE. Qu’on l’adule ou qu’on le haïsse, Eric Zemmour est l’ovni de cette campagne présidentielle. Observateur attentif du populisme, le philosophe Vincent Coussedière interroge son parcours et nous propose une analyse profonde du rôle historique de Zemmour. Chapitre trois. 

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On se souvient que Socrate déclarait être habité par une sorte de « démon », de demi-dieu le poussant à rechercher la vérité, le rendant parfois « atopos », absent des préoccupations de ses contemporains, se retranchant de ceux-ci pour méditer.

Il semble que Zemmour possède un « démon » comparable. Il lui arrive également d’être « atopos ». Il semble absent sur un plateau de télévision de tout ce qui n’est pas l’enjeu du débat, concentré et tendu à l’extrême vers celui-ci. Détaché des signes de reconnaissance, il ne joue que peu le jeu de l’entre-soi médiatique, n’étant attentif qu’aux signes que lui envoie la divinité qu’il sert : la nation. Tout part de la nation chez Zemmour, et tout revient à la nation. Celle-ci est l’instinct et le démon socratique qui pousse notre populiste à détruire les idoles de la religion des droits de l’homme. La nation est l’instinct de Zemmour comme la raison est l’instinct de Socrate qui le pousse à détruire toutes les croyances. Elle est son véritable daïmon, celui qui l’agite parfois même visiblement à l’écran, l’amenant à un léger tremblement irrépressible des jambes, à serrer les bras croisés, à plisser légèrement les paupières, tout cela avant de fondre sur l’adversaire pour le réfuter.

Comme il le redira dans un débat avec Bernard Henry Lévy sur Cnews, le 21 octobre 2019, dans lequel celui-ci se félicitait des valeurs universelles des droits de l’homme, lui ne s’intéresse qu’à la France, et à ce qui sert la France. Le soleil de Zemmour n’est pas le soleil platonicien du Bien, qui éclaire le Beau et le Vrai, mais le soleil du bien de la France. Est vrai, beau et bien pour Zemmour ce qui est bon pour la France.

Platon lui-même d’ailleurs nous laisse entrevoir un Socrate dont le « démon » est loin d’être une raison universelle désincarnée,...

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