Loi Avia: le censeur censuré
Belle surprise: le Conseil constitutionnel a retoqué ce jeudi 18 juin des dispositions majeures de la "loi contre la haine en ligne", adoptée le 13 mai dernier. Une victoire réjouissante pour la liberté d’expression.
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L’obligation pour plateformes numériques, telles que Facebook ou Twitter, de retirer de leur propre chef, sous peine de sanctions pénales, les "contenus à caractère haineux ou sexuel" dans les 24 heures suivant leur publication est notamment critiquée par les sages de la Rue de Montpensier.
Cette disposition était la plus problématique car elle consistait à confier à des opérateurs privés des prérogatives de censure jusqu'ici exclusivement détenues par les juges. Une délégation de pouvoir d'autant plus dangereuse que certains de ces opérateurs appartienent au cercle très puissant des firmes américains "GAFAM" (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), aussi riches que des Etats.
Le principe même sur lequel reposait la loi, à savoir réprimer "la haine", était également discutable. Sans mêmerevenir sur le sophisme selon laquelle empêcher l’expression d’un sentiment suffirait à l’annuler, il faut rappeler, comme l’a remarquablement fait l’avocat aux conseils François Sureau, que "la haine relève du for intérieur. Elle ne saurait pour cette raison faire l’objet d’une répression pénale."
Le Conseil constitutionnel considère en définitive que "le législateur a porté à la liberté d’expression une atteinte qui n’est pas adaptée, nécessaire et proportionnée au but poursuivi". Sage décision: Internet restera en France, pour quelques temps encore, un espace relativement préservé.