Václav Havel, Une présidence disruptive (Partie 3)
EXPERTISE. Dans cette troisième partie d’une longue étude consacrée à la vie et à l’œuvre de Václav Havel, Eric Larue explore le passage de la République Tchèque d’une économie planifiée rigide à une économie de marché au cœur des années 1990 post-soviétiques.
Vers l'économie de marché : Privatisations et restitution
- Introduction
La restitution de la propriété privée aux citoyens a caractérisé une grande partie de la situation économique des premières années de Havel à la tête de la Tchécoslovaquie et de la République tchèque. Elle a commencé par une "privatisation à petite échelle" qui était plus ou moins complète en 1991, suivie par une "privatisation à grande échelle des grandes entreprises d'État" qui a pris plusieurs années. Havel n'était satisfait ni du rythme des réformes économiques ni de leur ampleur et, selon lui, "les réformes avaient abouti à l'apparition d'un marché plutôt qu'à la réalité".
L'institution de ce projet par Havel lui valut des critiques pour la logistique de sa mise en œuvre,ainsi que pour avoir rendu les droits de propriété aux bourgeois. Certains ont profité de ce processuschaotique pour revendiquer la propriété de propriétés dont ils n'étaient que les administrateurstemporaires. Havel déplore rétrospectivement que "j'aurais dû me fier bien davantage à mon propre bon sens et faire moins confiance aux experts" (To the Castle and Back).
Pour Havel, le type d'économie en place informe en fin de compte l'expérience d'un individu de ce que signifie être humain, ainsi que son sens des responsabilités. En d'autres termes, la propriété et les systèmes économiques de récompense sont essentiels à l'expérience psychologique humaine, et sont donc d'une grande importance à ses yeux.
"Jusqu'à ce jour, certaines personnes secouent la tête parce qu'un château qui abritait une école d'infirmières a été rendu à un comte revenu de Dieu sait où.
Mais même cela était la bonne chose à faire. Si c'est la justice que vous voulez, alors elle doit être pour tout le monde" (To the Castle and Back).
Bien qu'il ait insisté sur la réforme économique, Havel s'en est finalement remis à la volonté...