Et la France périphérique continuera d’être méprisée
CONTRIBUTION / OPINION. Dans cette valse électorale à trois temps qui a monopolisé toute l’attention du pays ces dernières semaines, l’espérance, la crainte et l’amertume ont tour à tour enchanté et irrité les Français. Malgré les espoirs de changement, le statu quo reste finalement de vigueur et la grande perdante de ces élections s’appelle la France périphérique.
Contre toute attente, la gauche s’est positionnée à l’issue du second tour des élections législatives comme la première force politique à l’Assemblée nationale, suivie par un centre certes affaibli, mais devant un RN relégué à la dernière place au mépris de son objectif affiché de majorité absolue. Ironie du sort, le RN aura pourtant été, au premier comme au second tour, le mouvement le plus plébiscité dans les urnes. Quoiqu’il en soit, les vagues de désistements massives et autres magouilles politiciennes pour faire barrage à « la peste brune » seront parvenues à priver la France d’une alternance nationale au détriment du jeu démocratique.
Une terre, deux France
Cette grande alliance des blocs libéraux et progressistes contre la percée du RN réveille la fracture qu’avait déjà repérée le géographe Christophe Guilluy entre une France urbaine connectée aux flux de la mondialisation et une « France périphérique » déclassée et rejetée par les élites. Lorsque l’on parle d’un paysage politique décomposé en 3 camps : gauche, centre et bloc national, il ne faut pas oblitérer que par réflexe de classe, les deux premiers s’allieront naturellement face au troisième en cas de remise en cause de leur hégémonie. Avec des moyens certes différents, la gauche et le centre souscrivent en réalité au même dessein politique et philosophique : individualisme moral, dépassement du cadre national, fédéralisme européen ou encore fin de la continuité historique des peuples. Comme le rappelle Jean Claude Michéa (cf La double pensée), Marx lui-même, dans L’Idéologie allemande, pointait ce phénomène de ralliement des deux parties face à la menace d’un sursaut populaire. En soulignant cette opposition factice, l’auteur du Capital exposait l’idée que la bourgeoisie moderne possède sa propre division du travail comprenant d’un côté les « intellectuels actifs » aujourd’hui représentés par la gauche culturelle et de l’autre les « passifs » incarnés par le centre...