Témoignage

Je suis née libre !

TEMOIGNAGE. Le texte très touchant d’une abonnée d’origine arménienne. Un questionnement fort et profond sur les origines, sur l’assimilation. Sur ce que cela dit de nous, de notre rapport au passé, de notre rapport aux parents et à la mémoire familiale.

/2020/11/Immigration_France_Arménie_FrontPopulaire

Enfant d’immigrés je suis, enfant d’immigrés je reste.
Mais au fond, qu’est-ce que cela peut bien signifier ?
Élevée dans une famille d’immigrés, certes, mais éduquée et élevée dans la République française. Que reste-t-il de mes origines ? Un faciès ? Un teint mat ?
Loin de moi l’idée de renier une origine mais que veut-elle dire ? Moi qui ne parle même pas la langue maternelle de mes parents. Moi, qui ne possède même pas une once de cette culture.
Pourtant, fille d’immigrés je suis, fille d’immigrés, je reste.

Avec un père ouvrier arménien émigré de Turquie qui commença sa carrière dans l’industrie comme manœuvre, et une mère d’origine arménienne, enseignante tirée de l’école de la rue par une directrice d’école hors du commun, j’ai vécu une enfance étrange dans un univers protégé. J’allais à l’école dans le même établissement que ma mère. Tous les matins, dès l’âge de la maternelle, je trottinais derrière elle. Je crois me souvenir que c’était une course effrénée car nous étions généralement en retard. Ma mère était une grande dormeuse et avait toujours beaucoup de mal à se réveiller. Pour cause, elle commençait à travailler pour ses élèves à partir de dix heures du soir, lorsque les enfants étaient couchés. En y repensant, j’ai gardé cette habitude d’être en retard et de marcher plutôt vite !

J’ai « grandi » dans le même collège d’enseignement général jusqu’à la 3ème, parmi des professeures, amies de ma mère. Je me souviens avoir été chouchoutée et que mon origine étrangère n’avait pas d’importance. À tel point que je me considérais totalement française dans l’âme, ce qui me valut des bagarres avec ma grand-mère qui n’arrêtait pas de me rappeler mon origine. Cette grand-mère apatride qui parlait très mal le français et que, finalement, j’ai très peu connue en la côtoyant si souvent !

J’allais a...

Vous aimerez aussi