« Une réponse proportionnée »
CONTRIBUTION / OPINION. Lorsqu’un pays est sauvagement attaqué, comme l’a été Israël par le Hamas le 7 octobre dernier, la question de la proportionnalité de la riposte bouleverse toutes nos considérations morales et stratégiques.
Les journalistes ne sont pas en reste d’une sottise pour essayer de prendre au piège les hommes politiques qui auraient le malheur de répondre à une question stupide en moins de 140 caractères. En chasse d’une parole tronquée qu’ils pourraient exposer dans un beau bandeau sur les réseaux sociaux, comme une belle tête d’éléphant, ils demandent en boucle : « Appelez-vous Israël à une réponse proportionnée ? » Ou plutôt, lâches qu’ils sont, ils reprennent la sottise d’un autre et demandent : « Appelez-vous, comme Dominique de Villepin, à une réponse proportionnée ? » Le même personnage, grand admirateur de Napoléon et stratège, lui aussi à ses heures perdues, avait conçu la dissolution géniale de 1997 et nous fait part (il n’est pas le seul) de cette proposition tout aussi lumineuse.
En premier lieu, le terme de « réponse » dans un contexte militaire est un anglicisme. Il faut parler de « riposte ». Mais nous n’en attendons pas moins d’une classe d’hommes politiques et de journalistes dont très peu peuvent prétendre avoir fait leur service militaire, même s’ils sont nés avant 1979, puisqu’ils ont souvent fait des pieds et des mains pour y échapper, avec succès, contrairement à leurs camarades moins privilégiés. (Au passage, je ne vois pas de mention de service militaire sur la fiche biographique de notre génial stratège.) Le terme « proportionné » est lui aussi impropre, puisque M. de Villepin nous donne pour définition d’une réponse proportionnée celle d’une riposte « graduée » (on dit aussi « mesurée ») ou « ciblée », l’un ou l’autre, et en aucun cas « proportionnée ».
Nuls en maths, les commentateurs n’ont pas non plus vraiment suivi leurs cours de collège (et on dit que le niveau s’effondre depuis…) et compris le concept de proportion. Le terme s’emploie parfois dans le cadre d’une superpuissance qui, attaquée, pourrait réduire à néant une force ennemie, mais décide de proportionner sa riposte à...