idéesopinions

Jules Monnerot, l’indomptable

CONTRIBUTION / OPINION. Défenseur irréductible de la liberté d’expression, ignoré et censuré par l’université française, Jules Monnerot aura été l’un des analystes critiques les plus fins, subtils et implacables du marxisme en tant que religion séculière. À l’occasion du 30ème anniversaire de sa mort, Jerónimo Molina, professeur de politique sociale à l’Université de Murcie, reconnu dans le monde hispanique comme l’un des meilleurs connaisseurs des pensées de Carl Schmitt, Julien Freund, Gaston Bouthoul et Raymond Aron, nous rappelle ce que fut sa vie et l’importance de son œuvre.

jules-monnerot


[Ce texte est la traduction en français d’un article espagnol publiée avec l’autorisation de l’auteur et de La Gaceta Iberosfera.]


Dans son édition du dimanche 4 juillet 1989, le Journal Officiel publiait les candidatures aux élections du Parlement européen du 15 juin 1989. Sur la liste Europe et Patrie, menée par Jean-Marie Le Pen, en trentième position, figurait Jules Monnerot. En réaction, ses anciens camarades de la Société des amis de Roger Caillois le soumirent immédiatement à un procès sommaire, un autodafé, et l'expulsèrent. Il s’agissait semble-t-il des derniers relents surréalistes. En mars 1990, Monnerot dirigeait le conseil scientifique du Front national, le think tank du parti. Mais l'opposition de Le Pen à la guerre du Golfe (août 1990), favorable à l'Irak et hostile aux États-Unis, l'exaspérèrent. En désaccord avec le tribun breton, il quitta son parti à peine quelques mois après y avoir adhéré. Ennemi du « diabolisé » et de ses diabolisateurs, personne n'était plus seul et isolé que Monnerot dans la France des années 1990.

Cela dit, l’exclusion de son nom dans les répertoires sociologiques remontait à une époque bien antérieure. « Soit je suis mort, soit je n'ai jamais existé », disait-il avec lucidité. Les très nombreux pilleurs de ses textes, ont pour habitude de ne jamais mentionner son nom. La censure s'est occupée du reste. Monnerot ne passe pas le filtre du politiquement correct et ses idées sont préventivement saisies depuis la publication de son livre magistral Sociologie du communisme en 1949. « Me ne frego », disait-il en italien, ce qui mettait tout le monde mal à l'aise. Il ajoutait : « Ils veulent me torpiller, mais je dois être insubmersible ». Pourtant, sa présence et son action en tant qu'homme de lettres, journaliste, conseiller du prince et politicien est une constante de la vie intellectuelle française depuis le début des...

Vous aimerez aussi