Forces armées
Par Jean-Philippe Immarigeon.
« Je suis votre chef ! ». Ces mots prononcés par Emmanuel Macron le soir du 13 juillet 2017 devant les armées, à l’acmé d’une dispute avec leur chef d’état-major, venant du seul de nos Présidents à ne pas avoir endossé l’uniforme avaient d’abord fait sourire, tout comme ses travestissements en sous-marinier et pilote de chasse. Mais au-delà du prurit d’un adulescent qui ne se reconnaît aucune limite, ces propos, dont l’incongruité ne le cédait qu’à la grossièreté, s’avèrent avoir constitué un véritable coup de force institutionnel, inaugural de son mandat. Car n’en déplaise aux mannes de Maurice Duverger pour qui la Constitution n’est qu’un comburant du jeu politique, s’il est un domaine où elle n’est pas présidentialiste, c’est bien celui des armées.
Code de la défense
Que dit le texte de 1958 ? Que le Premier ministre est responsable de la défense nationale aux termes de l’article 21, et que le gouvernement dispose des forces armées en vertu de l’article 20. Certes, le Président est leur chef au titre de l’article 15, mais comme l’étaient Félix Faure ou Albert Lebrun. Ce texte, pas plus que l’article 5 précisant qu’il est garant de l’indépendance et de l’intégrité du territoire, ne saurait justifier un domaine réservé. Emmanuel Macron n’est pas commander in chief comme l’est un Président américain au pouvoir hiérarchique sur la troupe, institution créée en 1775 pour George Washington, qu’il restitue à la paix en 1783, et qui est réattribuée par la Constitution de 1787 au Président, chef de l’exécutif, au titre de ses prérogatives.
Rien de cela en France, où le chef de l’État ne commande plus aux armées ni ne déclare plus la guerre depuis 1870. Sauf sous Vichy entre 1940 (acte constitutionnel n°2) et 1942 (acte n°11) et encore, non du fait de pouvoirs propres mais parce que Philippe Pétain...