Généalogie du journalisme contemporain
Hébert leur père à (presque) tous. In memoriam Dominique Baudis L'édito de Michel Onfray.
Quand je regarde les caricatures publiées dans la presse révolutionnaire pendant la Révolution française, je ne peux m’empêcher de penser que des journalistes tuent. Pas tous, bien sûr, mais quelques-uns qui en font clairement profession en désignant à la vindicte la cible sur laquelle ajuster le tir. Certes, le meurtre est propre, il est perpétré au silencieux, à distance. Le tueur n’a pas de sang sur les mains, on ne trouve pas non plus de cervelle sur la table où il écrit ou dessine ses invitations au crime, ses incitations au meurtre, ses excitations à l’assassinat. Juste un peu d’encre sur les doigts.
Je crois par exemple que ce gros et gras Louis XVI (qui, en vérité, mesurait 1, 93 m…) buvant au goulot d’un litre de vin avec bonnet phrygien et cocarde sur la tête ; que la famille du roi caricaturée en cochons traînés dans une charrette ; que ce sans-culotte qui conduit au fouet un roi dindon, une reine louve et ses enfants louveteaux ; que ce gros évêque mené manu militari sous un pressoir ; que ce roi crucifié auquel Robespierre à cheval sur une chimère nommée Constitution porte l’éponge de vinaigre à la bouche ; que ce curé pendu au battant de sa cloche ; que ce roi présenté en Gargantua se goinfrant et en « oracle de la dive bouteille », autrement dit en ivrogne ; que cette hydre aux têtes d’aristocrates qui ne méritent que d’être tranchées ; que cet évêque à qui l’on impose un clystère ; que cet homme qui se torche avec la bulle du pape ; que ce monarque représenté en enfant dans une voiture poussée par la reine ; ou juché sur un cerf à la large ramure pour signifier qu’il est cocu ; ou caché dans un tonneau avec...