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La carte protectionniste : prélude à l’autonomie alimentaire

Le marché agricole n’est pas un marché comme les autres, si bien que le libéralisme économique y fait souvent du dégât. Jacques Sapir réhabilite les vertus du protectionnisme pour le monde économique en général, et pour le monde agricole en particulier.

CARTE-PROTECTIONNISTE


Que ce soit directement ou indirectement, la question du protectionnisme est au cœur du débat public. De la question des productions agricoles, où cette question est clairement posée, jusqu’au dernier livre de Bruno Le Maire (1), on la trouve au détour de beaucoup d’enjeux. Il faut dire que, dans les faits, il est difficile de s’en passer. Le protectionnisme apparaît comme une condition au développement des économies, mais aussi du commerce. On ignore trop souvent que le développement rapide des économies européennes et étatsuniennes de la fin du XIXe siècle jusqu’à la guerre de 1914 s’est fait dans un cadre dominé par le protectionnisme. Rappelons ici en guise d’introduction que contrairement à une idée reçue tenace bien que ridicule, le protectionnisme n’est pas synonyme d’autarcie. L’analogie parlante de l’autarcie est celle du barrage, qui en principe doit complètement isoler une économie du monde extérieur. 

En vérité, l’autarcie n’a historiquement jamais fonctionné et le modèle présenté par le théoricien allemand Fichte de « l’État commercial fermé » est resté une pure construction intellectuelle. Les pays qui l’ont tenté, que ce soit l’Italie mussolinienne ou l’Allemagne hitlérienne, ont en réalité cherché à réduire mais non à supprimer le commerce international. L’Allemagne s’est d’ailleurs rapidement tournée vers une logique de prédation sur les pays vaincus, à l’instar de la France. Aujourd’hui, même la Corée du Nord entretient des échanges économiques avec ses voisins que sont la Chine et la Russie. L’analogie correspondante au protectionnisme est celle de l’écluse, qui vise à réguler mais non à supprimer les échanges (2). Il cherche plutôt à redonner au pays qui y a recours une autonomie de décision pour mettre en place, ou pour reconstruire, sa souveraineté économique. Différents auteurs du XIXe et du XXe siècle, de Jean-Antoine Chaptal à Alexander Hamilton pour les précurseurs à Henry Charles Carey...

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