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La Ve République en héritage : De Gaulle et les institutions

« Les pouvoirs publics ne valent en fait et en droit que s'ils s'accordent avec les intérêts supérieurs du pays, s'ils reposent sur l'adhésion confiante des citoyens. » De Gaulle, discours de Bayeux, 16 juin 1946

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Imagine-t-on de Gaulle... », est devenu un gimmick un peu envahissant depuis la sortie a posteriori cocasse de François Fillon. Pourtant, devant la gestion calamiteuse par Emmanuel Macron de la crise politique qu'il a lui-même créée, comment un Français pourrait-il ne pas se poser la question ? Comment ne pas s'étonner d'un tel décalage entre cette pratique du pouvoir, très scrupuleuse à l'égard de l'esprit des institutions, avec celle d'Emmanuel Macron, bêtement assis sur la lettre de la Constitution, comme s'il s'agissait d'un vulgaire règlement intérieur ? « La lettre tue, l'esprit vivifie », certes, mais pas seulement.

Depuis l'introduction de l'élection du président de la République au suffrage universel direct en 1962, la Constitution a été modifiée pas moins de vingt-trois fois.

Certaines de ces révisions ont fait dériver la fonction présidentielle de l'arbitre garant des institutions à un chef de l'exécutif, ramenant le Premier ministre à un « collaborateur », pour reprendre les mots de Nicolas Sarkozy, comme le quinquennat (2000) ou la possibilité pour le Président de s'adresser au Congrès (2008). Certaines étendent les pouvoirs du Conseil constitutionnel, comme l'ouverture de sa saisine aux parlementaires (1974) ou l'invention de la question prioritaire de constitutionnalité (2008). D'autres affaiblissent la démocratie sociale, comme la création d'une loi de financement de la Sécurité sociale (1996). D'autres, enfin, visent à la rendre en théorie compatible avec les traités européens de Maastricht (1992), Amsterdam (1998) et Lisbonne (2008).

L'essentiel de l'évolution des institutions a pourtant eu lieu sans modification formelle du texte : une véritable mise en compatibilité de la Constitution aurait montré aux Français l'ampleur du changement. Les traités européens, en confiant certaines compétences en intégralité (politique commerciale, politique monétaire) ou pour l'essentiel (tout le reste) à une instance supranationale, et en interdisant aux pouvoirs publics de mener certaines politiques (budgétaire, industrielle...), sont bien entendu incompatibles avec l'article 3 :...