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Le Tour de France dans l'imaginaire populaire

Le Tour de France n’est pas un simple événement sportif, c’est une composante à part entière de notre mythologie nationale, où se manifestent des enjeux qui dépassent largement le cadre de l’anecdotique. Car la « grande boucle » symbolise la diversité des terroirs français, soudés dans un même hexagone, ainsi que la solidarité de tout un peuple face à l’effort et sa résistance aux douleurs de l’Histoire. Toucher à ce monument de notre mémoire collective reviendrait à nous amputer d’un pan de notre patrimoine.

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Alors que septembre, Covid oblige, avait remplacé juillet à l’heure de décerner le maillot jaune, une méchante petite musique s’est élevée. Elle serinait que le Tour de France était « sexiste », « polluant », qu’il avait « fait son temps » et accordait une part trop belle à l’argent et au dopage. On croyait lire L’Humanité qui fustigeait en 1924 le Tour de France au nom des travailleurs exploités par les « mœurs sportives bourgeoises ». Au bout de quelques années, changement de discours : les électeurs communistes étaient au premier rang sur le bord des routes et L’Huma, comme tout le monde, se mit à applaudir.

Les contempteurs en chemise verte, eux, n’ont rien compris : ils croient que le Tour de France est une course cycliste alors que c’est un monument national, au même titre que la tour Eiffel, la gastronomie française et la cathédrale de Chartres. Ce n’est pas pour rien qu’il figure dans les « lieux de mémoire » célébrés par Pierre Nora.

UNE VÉRITABLE FÊTE NATIONALE

Créé en 1903 par Henri Desgrange, le Tour de France est une subtile alchimie entre le sport, l’histoire, la géographie et parfois la politique. C’est Vidal de La Blache, Lagarde et Michard, Malet et Isaac désormais magnifiés par les caméras de télévision, les drones et les caméras embarquées dans le peloton. Dans La République du Tour de France, Jean-Luc Bœuf et Yves Léonard notent que les Français, avant 1914, n’ont pas en tête la carte d’ensemble de leur pays, que même le fameux Tour de France par deux enfants ne montre pas. C’est le Tour cycliste qui va la dessiner, à une époque où il en épouse les contours, partant par exemple de Paris pour rallier Le Havre, Cherbourg, Brest, Les Sables d’Olonne, Bayonne, Luchon, Perpignan, Toulon, Nice, Briançon, Gex, Strasbourg, Metz et Dunkerque avant de revenir vers la capitale....