Les « élites » : solution et problème
Au sujet des élites, la confusion règne. Saluées ou conspuées avant même d’être définies, elles font le plus souvent figure de repoussoirs. De quoi parlons-nous ? La France doit-elle rompre avec ses élites pour renouer avec l’Élite ?
« L’important n’est pas de sortir de l’X, mais de sortir de l’ordinaire  » – Charles de Gaulle
Le questionnement sur les élites est l’un des ponts aux ânes de la réflexion politique contemporaine, en France comme ailleurs, même si les lignes qui vont suivre sont surtout consacrées à notre pays. Tout est-il toujours de leur faute ? Sont-elles les boucs émissaires d’une population vindicative ? Le mal nécessaire auquel l’esprit démocratique n’arrive pas à s’accoutumer ? Une clique de rapaces vivant grassement de prévarications diverses, mais fort satisfaites d’elles-mêmes ?
L’Élite ou les élites ?
Disons-le tout de go, le terrain est miné. Il va falloir peser chaque pas pour débroussailler ce sujet. Avant même le mot, la querelle du singulier et du pluriel. Pourquoi les élites et non pas l’Élite ? Car l’existence d’« une élite » est acceptée par la quasi-totalité du corps social. Bien que ce dernier puisse ne pas admettre les critères nécessaires pour y accéder, selon le lieu et l’époque, il reconnaît généralement que les personnes dotées de qualités supérieures de cœur et de force d’âme constituent un groupe distinct auquel les autres peuvent s’identifier, tout comme on s’identifie globalement au « meilleur de soi (1) ». En ce sens, la Résistance fut l’élite de la France entre 1940 et 1944. À quelques exceptions près, liées à des lignées compliquées, peu de Français en disconviendront.
« Les élites » posent déjà plus de problèmes, surtout en France. Un darwinisme social basique et brutal voudrait que les forts écrasent les faibles et certains imaginaires historiques n’en sont pas loin (suivez mon regard vers l’outre-Rhin), mais pas chez nous. La question française par excellence, à la fois juste et persifleuse comme nous savons l’être, est la dyade : « Qui t’a fait comte ? Et toi, qui t’a fait roi (2) ? ». En effet, en France, dominer ne va pas de soi. Contrairement...