L'homme nouveau européen
Par Michel Onfray
Quand Sandrine Rousseau, égérie médiatique des écologistes plus que philosophe de la cause, candidate à la candidature à la présidence de la République, se réjouit de « vivre avec un homme déconstruit » et qu’elle ajoute « je ne fais pas confiance à des hommes ou femmes qui n’ont pas fait le chemin de la déconstruction », que doit-on comprendre ?
Quand Emmanuel Macron, le Président sortant, présente pour la sixième année ses vœux non plus à la nation, comme on disait jadis, mais « aux Français », il énonce une foultitude de banalités bien dans son genre mais, comme un signe donné à qui veut bien l’entendre, il fourre sa galette verbeuse d’une fève singulière : il veut faire de l’année nouvelle « une année de régénération » !
Personne n’a relevé que ce mot suppose que nous vivons dans un temps dégénéré… On peut dès lors légitimement se poser quelques questions : qui est dégénéré ? Quand ? Comment régénérer ? À qui incombe cette tâche ? De quelle façon déconstruit-on l’homme ? Mais surtout : comment le reconstruit-on ? Qui décide de qui régénère ? Et qui, ou quoi, est dégénéré ? Selon quels critères ? Pour produire quel Homme Nouveau ?
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Le mot régénérer relève du vocabulaire des Jacobins de 1793 qui veulent régénérer la société, en d’autres termes : la déconstruire, afin de réaliser le paradis politique sur terre avec un Homme Nouveau. L’homme à déconstruire, c’est celui de l’Ancien Régime : l’aristocrate, le noble, le prêtre, l’évêque, le féodal, l’émigré qui fuit la guillotine promise, à lui mais aussi à sa famille et à ses amis, à ses proches, et puis, en vertu de la loi sur les suspects du 17 septembre 1793, à ceux qu’on peut se contenter de soupçonner, autrement dit : d’accuser sans preuves.
Quiconque ne montre pas assez de zèle révolutionnaire entre dans cette catégorie et se trouve susceptible d’être déféré au Tribunal révolutionnaire, une...