L'identité est-elle l'apanage de la droite ?
Si le concept d'identité (somme toute récent en politique) fait florès à droite, une certaine gauche, certes minoritaire, n’en a pas pour autant perdu le sens de la nation. Et que dire de la gauche “sociétale” qui, quoi qu’elle en dise, a le culte de l'identité… de l'identité communautaire ?
Quelle place pour la notion d’identité sur l’échiquier politique ? Au premier abord, à écouter la doxa officielle, il serait simple de répondre que le concept d’identité, source relativement récente d’interrogations philosophiques et politiques, renvoie à la droite et plus encore à la droite souverainiste ou nationaliste, tandis que la gauche serait porteuse de pluralité, d’universalisme et d’ouverture au monde.
Pourtant, le débat sur le sujet était très différent il y a une quarantaine d’années. À la fin de sa vie, l’historien Fernand Braudel (1902-1985), inclassable politiquement, achevait la rédaction de son ouvrage magistral L’Identité de la France (éd. Arthaud, 1986) et écrivait : « Je crois que le thème de l'identité française s'impose à tout le monde, qu'on soit de gauche, de droite ou du centre, de l'extrême gauche ou de l'extrême droite. C'est un problème qui se pose à tous les Français1. »
Ce refus légitime d’une assignation à résidence ne doit toutefois pas nous dispenser de nous interroger : les différentes familles politiques de notre pays ont-elles toutes la même préoccupation de l’identité ?
À droite, l’identité comme permanence
Commençons par la droite, en rappelant tout d’abord que contrairement à la théorie rabâchée par les lecteurs béats du démocrate chrétien René Rémond, il n’existe pas trois traditions de droite en France. Car le bonapartisme et l’orléanisme étaient au XIXe siècle des centres, comme l’ont démontré les travaux des universitaires Stéphane Rials et Frédéric Bluche. La droite en France est liée à une vision contre-révolutionnaire de la politique, née en réaction aux excès de la Révolution française, mue ensuite par des réflexes conservateurs et dans laquelle on peut classer des intellectuels comme Joseph de Maistre, Louis de Bonald, le marquis de La Tour du Pin, Maurice Barrès, Charles Maurras ou, plus près de nous, le philosophe Pierre Boutang.
Les tentatives, entreprises dès François-René de...