Le populisme, si on ne le considère pas simplement comme un discours démagogique qui parle au nom du peuple, mais comme la lutte des peuples contre leur propre décomposition, nous reconduit à la question posée autrefois par Rousseau : quel est l’acte par lequel un peuple est un peuple, et pourquoi cet acte est-il menacé de ne plus pouvoir s’exercer aujourd’hui ? On a coutume de poser cette question comme étant celle de l’identité nationale. L’identité nationale et sa préservation relèveraient d’une métapolitique consistant en un combat essentiellement idéologique. Ainsi, pour la droite conservatrice, fière de se situer dans la filiation d’un Gramsci, restaurer l’identité nationale, ce serait essentiellement s’assurer du monopole du récit idéologique et de sa diffusion. La nation se refonderait en partant du haut, de son « idée », et en redescendant vers le bas en investissant les institutions diffusant l’idéologie. À écouter Éric Zemmour, plus on crierait fort : « En France, fais comme les Français », et plus on aurait de chances de refonder un peuple et une nation. Las, il semblerait, au vu des scores obtenus par Reconquête ! aux dernières élections, européennes comme législatives, que les Français restent sceptiques devant cette entreprise.

Le fondement archi-politique de la nation

Il n’est pas sûr que la métapolitique, qui relève d’une pensée idéaliste de la nation, permette de mesurer le défi de la crise du populisme dont il est nécessaire d’avoir une vision plus « matérialiste ». Ce n’est pas la nation métapolitique idéale qui s’effondre, mais la nation comme condition archi-politique, c’est-à-dire comme préalable à toute politique. Précisons ce que nous entendons par « archi-politique ». On propose parfois la distinction entre « le politique » et « la politique » pour marquer une différence de niveau entre deux réalités dont l’une est le fondement de l’autre. Lorsqu’on parle « du politique », on fait signe vers la dimension communautaire des sociétés humaines,...