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Union européenne : le coup d'État permanent de la « technocratie commode »

Avec sa Commission, son Parlement et sa Cour de justice, l’Union européenne ressemble à s’y méprendre à un système démocratique exemplaire. Sauf qu’il ne s’agit que d’un funeste simulacre, comme le démontre de façon imparable Olivier Delorme.

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Négociant en cognac devenu banquier à San Francisco, Jean Monnet avait préféré se mettre au service des Britanniques plutôt que de représenter la France libre à Washington. Puis en 1943, ses nouveaux employeurs américains l’envoyèrent à Alger pour fournir un cerveau politique au très manipulable général Giraud, qu’ils entendaient substituer à de Gaulle. Plus tard, dans l’Europe de la guerre froide, le plus américain des Français devint l’inspirateur – selon le mot du général de Gaulle – de toutes les initiatives tendant à organiser l’ouest du continent en succursale des États-Unis : Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), Communauté européenne de défense (CED), structure permanente de l’OTAN, Communauté économique européenne (CEE), Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom), torpillage du traité franco-allemand de 1963 au moyen de l’ajout par le Bundestag d’un préambule unilatéral.

À travers ces initiatives, Monnet vise un objectif : empêcher les peuples de faire des bêtises. Il applique une méthode : réduire la démocratie à une forme électorale vidée de toute signification puisque les décisions seront prises par des instances non élues qui savent mieux que les peuples ce qui est bon pour eux. Il s’agit en fait d’un coup d’État permanent consistant à multiplier les faits accomplis techniques dont les citoyens ne doivent pouvoir discerner la fin ultime, en enserrant le politique dans des contraintes telles qu’au bout du compte une seule politique – la « raisonnable » – est possible. Ce que de Gaulle traduisait ainsi dans sa conférence de presse du 12 novembre 1953 : confondre « les États, les armées, les idéologies […] à la façon des capitaux de deux firmes concurrentes », tout en neutralisant la souveraineté des peuples par une « technocratie commode », agent de cette grande transformation. Toute la philosophie de la « construction européenne » depuis soixante-dix ans est là. Et il n’y en a pas d’autre.

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