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Verbigération

Par Ingrid Riocreux.

/2021/10/V_Verbigeration


Emmanuel Macron a depuis longtemps le goût de la parole publique. On le sait, il a appris le théâtre à l’école de Brigitte Trogneux et un documentaire diffusé par France 3, fin 2016, alors qu’il entre en campagne présidentielle, nous donne à voir sa performance d’acteur dans un extrait de La Comédie du langage1 de Jean Tardieu. Pourtant, c’est encore en « orateur perfectible » qu’il se lance dans la course à la fonction suprême, pour reprendre l’expression de l’ancien avocat général à la cour d’assises de Paris (aujourd’hui avocat et essayiste) Philippe Bilger qui remarque que dans son discours du 12 juillet 2016, « il a paru lui-même étonné par une démesure et un débordement auxquels il n’était pas habitué. Fugacement il s’est entendu comme s’il était un autre. […] je l’ai vu et entendu comme un gourou séduisant, plein d’empathie et de délicatesse. Sa personnalité étant presque plus convaincante que son propos. Donnant plus envie de le suivre que son argumentation ».

Observateur affûté de la rhétorique des puissants, Philippe Bilger a su pointer ce qui initialement constituait une force avant de devenir un handicap. Cette adhésion à sa personne plus qu’à son discours condamnerait tout autre à un échec rapide face à l’exigence de devoir prendre des positions tranchées. Mais Emmanuel Macron a trouvé la parade à ce risque en inventant le « en même temps ». Contrairement à ce qu’on pourrait croire, cette devise ne constitue pas un principe subtil de conciliation des contraires ; elle est un signe de vacuité totale.

Vides de sens, les discours de la campagne 2017 d’Emmanuel Macron sont des verbigérations hypnotiques qui peuvent durer deux heures et n’offrent prise à aucun résumé ; lui que ses études ont formé à la rigueur dialectique y renonce au profit des plus basses techniques de séduction : l’inclusion (« vous êtes...

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