Washington
Il y a, dans le hall d’entrée de la George Washington High School à San Francisco, une fresque murale dans le goût figuratif des années 1930, retraçant la vie du héros qui a déclenché une de ces crises picrocholines dont l’Amérique a le secret. On y voit, outre un guerrier amérindien mort, quelques-uns des esclaves qui travaillaient sur sa propriété de Mount Vernon. Certains élèves éprouvant un malaise devant cette fresque, les personnages seront donc dissimulés sous une autre peinture, sans souci pour le travail de l’artiste. Les Coréens du Nord ont encore beaucoup à apprendre. On y voit également trois soldats en uniforme bleu (qui devrait être blanc) levant les bras pour se rendre, avec à leurs pieds un de leurs camarades mort. Négligé en France, cet épisode bien connu des Américains est considéré comme fondateur. Il s’agit de l’assassinat, le 28 mai 1754 dans la vallée de l’Ohio, d’un officier canadien-français, Coulon de Jumonville, par des miliciens de Virginie commandés par Washington, alors colonel dans l’armée britannique. Personne, surtout pas nos diplomates, ne s’inquiète de ce compatriote baignant dans son sang ni de l’image donnée de notre armée, dont on suggère qu’elle a toujours capitulé en rase-campagne, énième manifestation du French bashing.
LA FRANCE N'EST PAS L'AMÉRIQUE
C’est que le nom de Washington est celui d’un aveuglement qui n’a pas d’équivalent chez les autres alliés des États-Unis : cela commence par la mésalliance entre les Insurgents et les Français, qui veulent bien oublier le crime de guerre de 1754 alors que Washington en avait été le commandant en chef. Remarquable opération d’agit-prop à mettre au crédit de Benjamin Franklin qui intoxique nos ministres sur la faiblesse de l’insurrection et abuse de l’enthousiasme des salons parisiens. Voilà la France piégée pour deux siècles et demi dans la chimère d’une...