IdéesFPContenu payant

Retour sur le « négationnisme de gauche »

ENTRETIEN. Il y a trois ans, Thierry Wolton brisait un tabou en osant employer le mot « négationnisme » pour qualifier ceux qui, à gauche, minimisent les crimes de masse commis dans l’Histoire au nom de leur idéal. À l’en croire, cette imposture intellectuelle est toujours vivace dans les rangs du wokisme.

/2022/12/7_Nega


F.P. : Qu’appelez-vous le « négationnisme de gauche » et en quoi serait-il particulièrement de gauche  ?

Thierry Wolton : À l’origine, ce terme regroupe tous ceux qui ont nié les crimes du communisme au temps du socialisme réel. Cela en faisait, du monde, au siècle dernier ! Et comme la majorité d’entre eux venaient de la gauche, notamment du Parti communiste, ce négationnisme penchait de ce côté-là. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu’une partie des négationnistes des chambres à gaz et du génocide des juifs durant la Seconde Guerre mondiale appartenaient à l’extrême gauche. Ceux-là prétendaient remettre en cause un discours dominant capitaliste qui aurait mis en avant ce crime nazi pour cacher ses propres crimes. Ainsi exerçaient-ils leur esprit critique sur un storytelling historique consensuel, disaient-ils. Ils peuvent être également catalogués comme négationnistes de gauche.


F.P. : Même chez les militants communistes contemporains, il n’est plus vraiment question de nier que le communisme réel a fait des morts. Le débat se situe davantage sur le nombre de victimes. L’Histoire n’étant pas une science exacte, peut-on espérer un réel consensus ?

TW : Les hommes font l’Histoire, les hommes la racontent, il y a forcément un aspect subjectif dans ce processus. La révision de l’Histoire, à ne pas confondre avec la négation des faits, est une démarche normale à mesure que les connaissances progressent. Il est vrai que plus personne n’ose vraiment mettre en doute l’aspect criminogène du communisme. Certains regrettent toutefois que le communisme n’ait pas tué plus de monde, qu’il se soit montré trop gentil, en somme. C’est le discours d’Alain Badiou par exemple, un « intellectuel » qui plastronne dans les médias, sans que personne ne lui demande de comptes sur ses propos. D’autres contestent le nombre des victimes, ou disent qu’on ne peut pas faire d’omelette sans casser d’œufs, bref, que la construction...